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Pêche & environnement. Le silure 1/2 : un redoutable prédateur

Pêche.

Pêche & environnement. Le silure 1/2 : un redoutable prédateur
Un grand prédateur à l'allure impressionante
Le silure qui a colonisé les eaux françaises est originaire d’Europe centrale, plus exactement du bassin du Danube, qui semble être le berceau de l’espèce. Aujourd’hui, par le biais d’introduction parfois intentionnelles et pas toujours réfléchies par des anonymes qui ont souhaité le pêcher près de chez eux, le silure est présent sur la quasi-totalité de notre territoire, même dans des petits milieux comme les lacs de barrage où sa place peut être écologiquement discutable.

La présence du silure en France a été observée dès 1857 sur une branche du canal Rhin-Rhône d’où il aurait ensuite gagné le bassin du Doubs.
À la fin des années 1960 sa présence est avérée dans la Saône puis sur ses affluents, en particulier sur la Seille où il semble avoir trouvé un milieu très favorable à une forte croissance. Via le canal du Centre, il commence ensuite à coloniser la Loire dans les années 1970, puis ses affluents au cours des années 1980. Le Rhône est à son tour occupé durant les années 1990 (c’est sans doute sur celui-ci que l’on trouve actuellement en France les plus gros spécimens). Puis ce fut le tour du bassin de la Garonne et de la Seine.

Identification & description


Son nom est Silure glane ( Silurus glanis). Il appartient à la famille des siluridés. Il a un corps allongé, renflé sur la partie antérieure qui constitue le premier tiers (de la tête à l’entame de la nageoire anale). La partie arrière jusqu’à la queue est comprimée latéralement. Les nageoires pectorales sont bien développées et de forme arrondie. La nageoire anale est très longue, elle s’étend ventralement de l’anus jusqu’à la queue. La nageoire caudale par contre est relativement petite, ainsi que les pelviennes. Quant à la dorsale, elle apparaît minuscule. La tête, grosse et aplatie, présente une très large bouche avec une mâchoire inférieure prognathe. Elle est pourvue de rangées de petites dents qui font penser à une râpe.
Sous le menton sont rattachés 4 barbillons courts évoquant une moustache, (d’où le surnom de “moustachu” que lui attribuent les pêcheurs). Deux autres longs barbillons viennent s’insérer à l’avant de la mâchoire supérieure. Situés en arrière de ces derniers, les yeux paraissent minuscules. La peau est dépourvue d’écailles et couverte d’un abondant mucus. La coloration du corps est très variable, allant du brun au gris verdâtre avec des tâches marbrées, le ventre est blanc crème . Certains sujets sont carrément albinos.

Taille et poids


Vers l’âge de la maturité sexuelle à 3-4 ans, il peut mesurer de 50 à 70 cm. À 10 ans, selon les conditions du milieu, il peut atteindre 1 m à 1,60 m.
En France, dans le Rhône ou la Saône, il se capture actuellement des individus qui atteignent 2,50 m et avoisinent, voire dépassent, les 100 kg.
Plus proche de chez nous, d’énormes poissons se prennent aussi sur le Tarn, dans la région d’Albi, où le plus gros silure homologué, pris en septembre 2017, détient le record du monde avec ses 2,74 m !

Biologie


Le silure s’adapte à une large gamme de conditions écologiques. Il affectionne les eaux plutôt calme de la zone à brèmes, mais il a une grande faculté d’adaptation. Ses besoins en oxygène dissous sont faibles, et il s’accommode d’une certaine turbidité. Son large créneau de tolérance thermique va de 3°C à 30°C.

Reproduction


Comme la plupart des poissons, le silure a un cycle de reproduction annuelle. Et comme pour les autres espèces, il semble que ce soit la température de l’eau qui conditionne le moment de la fraie. Au printemps, lorsque les eaux se réchauffent, il effectue une sorte de migration de pré-fraie qui l’amène des eaux calmes vers des secteurs plus courants.
Le silure étant un poisson d’eau plutôt chaude, c’est lorsque celle-ci avoisine 20°C que se déclenche le processus de reproduction, ce qui dans nos lacs aveyronnais correspond approximativement à la période mi-juin à mi-juillet. 
Les parades nuptiales et les accouplements se déroulent habituellement la nuit. 
La ponte à lieu le plus généralement dans des zones de hauts fonds, sur les bordures présentant un chevelu racinaire qui sert de support aux œufs. Ceux-ci sont recouverts d’une substance visqueuse qui leur permet d’adhérer au substrat.
L’incubation est de courte durée, de 3 à 7 jours avant que les alevins ne commencent à nager. Durant ce temps, le mâle reste à proximité du “nid” pour “aérer” les œufs afin de les nettoyer des sédiments fins et pour protéger la ponte de manière agressive contre tout intrus qui s’en approche.
Les scientifiques qui ont étudié le silure ont du mal à s’accorder sur le nombre d’ovocytes portés par kilo de poids vif d’une femelle ; mesurant en moyenne 2 mm de diamètre, ceux-ci se chiffreraient de 20.000 à 30.000 par kilo de poids vif.
Il semble que les mâles arrivent à maturité sexuelle vers l’âge de 3 à 4 ans alors que que les femelles ne l’atteindraient que vers 5 à 6 ans.

Un redoutable prédateur


Scientifiques et pêcheurs spécialistes du silure s’accordent sur l’activité crépusculaire et nocturne du silure, ce qui ne l’empêche pas de se nourrir parfois de jour.
Ses petits yeux ne semblent pas lui procurer une très bonne vue, par contre, il possède un « attirail » sensoriel très performant qui lui permet de détecter ses proies lors de son activité essentiellement nocturne ou par eau turbide. 
Si sa ligne latérale et ses barbillons lui permettent une localisation et un suivi précis de ses proies, il est également doté d’un système de détection particulier, les osselets de Weber. Ce système lui permet de capter une très large gamme de vibrations acoustiques : l’invention du clonk * par les pêcheurs d’Europe de l’Est est sans doute le fruit de l’observation de cette faculté.
Si, au début de leur existence, les alevins de silures adoptent le même régime alimentaire que les autres alevins d’eau douce, fait de zooplancton et de petits invertébrés benthiques, c’est au fur et à mesure de sa croissance que le silure va adopter son régime spécifique de prédateur. Il devient de plus en plus ichtyophage et à partir de sa deuxième année, les poissons forment 95% de son bol alimentaire, généralement des cyprinidés comme les gardons et les brèmes. 

Un poisson intelligent


Une fois adulte il est capable de capturer de grosses proies dépassant le kilo, comme des brèmes, des carpes, des carassins, des barbeaux etc. Les épines dorsales des percidés ne le dérangent pas, et il peut s’attaquer sans problème aux perches et aux sandres. Il consomme également des batraciens (grenouilles et crapauds), et des mammifères comme les rats et même des oiseaux. Les écrevisses américaines, là où elles sont présentes, semblent constituer pour lui un menu de choix.
Tout ceci dénote de l’intelligence de ce poisson, capable d’adopter un opportunisme alimentaire en développant des stratégies de chasse ; (voir sur le net la vidéo tournée sur le Tarn à Albi où l’on voit des silures adopter la technique de l’échouage pour capturer les pigeons de la cathédrale qui viennent boire dans le Tarn).
D’autres images ont été tournées à la passe à poissons de la centrale de Golfech où de gros silures entrent volontairement dans la passe de franchissement aménagée pour y chasser avec frénésie les poissons migrateurs de la Garonne qui sont contraints d’emprunter ce passage, comme les aloses, les lamproies marines, les anguilles et même les saumons. Il va sans dire que ces images ont soulevé une polémique qui existait d’ailleurs bien avant et qui a toujours cours ; il y a les pro-silures et les anti-silures.
De nombreuses études ont néanmoins montré que le silure n’est pas l’ogre insatiable qui alimente tous les fantasmes, comme ce fut à une époque reculée le cas du brochet. Si les juvéniles en pleine période de croissance et de maturation sexuelle ont une ration alimentaire journalière élevée par rapport à leur taille (annuellement, ceux-ci consomment de 3 à 5 fois leur poids total), une fois adulte, cette consommation annuelle devient  moins importante, (de 2 à 3 fois le poids total).
Dès que la température de l’eau chute en dessous de 8°, le silure ne se nourrit quasiment plus, jusqu’au réchauffement printanier des eaux.

Suivi de près


Sur la Dordogne, aux alentours de Bergerac, une étude importante est menée par l’association Epidor, afin d’étudier le comportement de l’espèce et son interaction sur les autres espèces de poissons et son impact sur le milieu en général. Cette association, qui possède une autorisation de pêche de nuit, a capturé plus de 900 silures sur un tronçon inventorié long de 115 km. La taille de ces poissons variait de 14 cm à 2,46 m.
Statistiquement, le rapport moyen taille/poids constaté est de 1,50 m pour 21 kg et 2 m pour environ 50 kg. Le sexe, ratio mâles/femelles, est proche de 50/50. 730 de ces silures ont été marqués, dont 438 avec un transpondeur pour détecter leur passage dans les passes à poissons des barrages ; 34 ont été équipés d’un émetteur radio pour en assurer un suivi télémétrique mobile. Ces suivis ont révélé que le silure est assez fidèle à son territoire, puisque, dans plus de 90% des cas, les déplacements constatés lors des recaptures de poissons marqués ont été inférieurs à 4 km. Malgré cela, il aura fallu seulement une quinzaine d’années pour que la Dordogne soit colonisée jusqu’en amont de Bergerac.
Dans le prochain sujet, nous verrons quels sont les déséquilibres que peut provoquer transitoirement ce poisson et comment, avec le temps, peut se créer un nouvel équilibre écologique permettant aux différentes espèces de mieux cohabiter, pour le bonheur des pêcheurs de toutes tendances.
*Le clonk est un instrument bruiteur qui sert à frapper l’eau pour produire des bruits en faisant éclater des bulles d’air qui font réagir les silures.

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