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Pêche et environnement. À propos de continuité écologique des cours d’eau

Magazine. De tous temps, les hommes se sont installés près des cours d’eau afin d’en exploiter les ressources. Ils y ont construit des ouvrages pour satisfaire diverses fonctions : Chaussées de moulins, seuils et biefs pour l’irrigation, canaux, et écluses pour la navigation, barrages pour la production hydroélectrique ou pour constituer des réserves d’eau. sans compter les multiples drainages qui ont asséché les têtes de bassins. Or, depuis quelques années on entend beaucoup parler de la reconquête de la continuité écologique ; mais qu’en est il précisément ?

Pêche et environnement. À propos de continuité écologique des cours d’eau
Cet aménagement routier mal conçu interdit aux truites de remonter.

Pêche et environnement

Bien que des premières prises de conscience se soient manifestées dès le début du XXe siècle, c’est devant l’urgence actuelle des problématiques écologiques qu’est née la directive cadre européenne sur l’eau de 2000 (la DCE) et la loi sur l’eau et les milieux aquatiques de 2006 (la LEMA), qui ont introduit dans leurs textes la notion de continuité écologique.

Cette notion signifie que la circulation des organismes vivants dans les cours d’eau, principalement celle des poissons migrateurs, — mais pas seulement —, puisse se faire librement aussi bien dans le sens de la dévalaison que de la montaison.

Elle implique également que le transport des sédiments, de toutes tailles, ne soit pas lui-même entravé, ainsi que le bon fonctionnement des réservoirs de biodiversité.

Si sur les quelques rares rivières restées dans leur état naturel, les migrateurs ne rencontrent guère d’obstacles à leurs déplacements, c’est loin d’être le cas sur la majorité des cours d’eau dont la plupart sont artificialisés.

En janvier 2019, 99.000 ouvrages ont été recensés par l’OFB* sur le linéaire des cours d’eau de France métropolitaine, soit en moyenne un obstacle tous les 6 km, et à ce jour, cet inventaire n’est peut-être pas encore totalement finalisé.

Selon l’OFB, un pourcentage élevé, plus de la moitié de ces équipements, n’aurait plus d’usage aujourd’hui et pourraient donc être supprimés.

Les impacts des ouvrages

Ces équipements ont de nombreux impacts sur les écosystèmes aquatiques.

Ils empêchent la libre circulation des espèces qui accèdent difficilement ou pas du tout à leurs zones de reproduction ou leurs habitats de croissance.

Par la réduction de la force des courants, ils freinent ou bloquent le transit des éléments grossiers, avec pour conséquences, l’uniformisation des habitats en amont de l’ouvrage ou un colmatage de ceux-ci, à l’aval, par les sédiments fins.

Le libre transit des sédiments est très important en permettant, entre autres, à la rivière de dissiper son énergie.

Si les sédiments grossiers sont bloqués en amont, la rivière aura tendance à en mobiliser en érodant les berges ou en creusant le lit — phénomène d’incision — ce qui peut entraîner le risque de déchaussement des ouvrages comme les ponts ou les routes jouxtant les rivières.

Les obstacles artificiels ont également des conséquences sur la qualité de l’eau. En ralentissant le courant ils créent des zones d’eaux stagnantes qui entraînent un réchauffement de l’eau avec pour conséquence une perte d’oxygénation au détriment de certaines espèces comme la truite en particulier, laquelle étant un sténotherme** d’eau froide peut être sévèrement affectée même par un faible réchauffement.

Les eaux stagnantes favorisent également le développement d’algues et de végétaux aquatiques indésirables — c’est le phénomène d’eutrophisation.

Les espèces les plus touchées

Le saumon est l’espèce migratrice emblématique la plus impactée par la multiplicité des barrages installés sur les rivières, mais, elle n’est pas la seule.

La truite de mer, l’alose, la lamproie marine, l’anguille — également grands migrateurs — sont également concernées.

La truite fario quant à elle est un migrateur partiel.

Toutefois bien qu’elle soit un petit migrateur, elle a néanmoins besoin de pouvoir effectuer des déplacements, certes moins importants que ceux des espèces précitées, mais parfois assez conséquents si nécessaire — de un à plusieurs dizaines de kilomètres — afin de gagner des zones de frayères favorables pour accomplir son cycle vital.

Le brochet est également une espèce qui est parfois amenée à se déplacer sur une assez longue distance pour trouver un biotope adapté à la réussite de sa reproduction.

Les solutions

Afin de réduire l’impact des différents équipements, plusieurs solutions d’aménagements existent et peuvent être proposées :

— Installation de passes à poissons pour faciliter la migration des espèces.

Toutefois, beaucoup de passes à poissons existantes ont une efficacité réduite ou parfois totalement obsolète.

— Réduction de la hauteur de l’obstacle afin qu’il puisse être franchi aisément.

— Ouverture temporaire des vannes durant les périodes de migration.

— Ouverture ponctuelle des vannes de fond pour redynamiser le transit et chasser les sédiments fins afin de décolmater le lit du cours d’eau en aval ; exemple sur la Selves en aval du barrage de Maury dans le Nord-Aveyron où EDF a réalisé des chasses qui se sont montrées bénéfiques.

Enfin, si les conditions le permettent — déséquilibre entre intérêts et inconvénients —, la suppression de l’obstacle reste la solution la plus efficace pour retrouver une continuité écologique vraiment fonctionnelle.

En Aveyron et en Lozère, des actions ont eu lieu ou sont en cours comme l’effacement de certains seuils devenus obsolètes ainsi que des chasses de remobilisation des sédiments fins, comme sur la rivière la Selves citée plus haut.

Mais beaucoup de choses restent à faire pour rétablir un fonctionnement écologique naturel qui permettrait de retrouver les potentialités que beaucoup de nos cours d’eau ont perdu.

Jack Tarragnat

* OFB : Office Français pour la Biodiversité (également police de l’eau).
** Sténotherme : qui vit dans un créneau de température réduit.
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