La rue Eugène Viala, à Rodez, mène de la préfecture à la place du Bourg. Mais connaissez-vous l'artiste de premier ordre à qui elle doit son nom ? Localement, le musée Denys Puech ou encore le château de Vezins exposent depuis longtemps les œuvres de cet artiste aux multiple facettes. Depuis peu, les “Amis d'Eugène Viala et du Lévézou” ont créé un musée à Salles-Curan, sa ville natale.
Eugène Viala, né en 1859, étudie les Beaux-Arts à Montpellier de 1877 à 1879. Il devient ensuite l'élève d'Ernest Hébert, qui fut Prix de Rome et directeur de la Villa Médicis. Il a également fréquenté les cabarets de Montmartre et Montparnasse à la grande époque. De retour à Rodez en 1889, il exerce le métier de photographe tout en essayant de vivre de son art. En 1903, il rencontre Maurice Fenaille, industriel du pétrole marié à une Aveyronnaise, et mécène, entre autres, de Rodin.
Fenaille constitue une collection de gravures de Viala, lui procure un atelier à Neuilly et lui offre un voyage en Italie avec Tristan Richard en 1909. En 1910, la ville de Rodez lui commande une grande peinture, Terre du Rouergue, pour orner le musée des Beaux-Arts qu'elle vient de créer, et qui prendra plus tard le nom de Denys Puech.
Eugène Viala décèdera à Salles-Curan à l'âge de 54 ans, en 1913, des suite d'une chute en descendant d'un tramway à Paris.
De l'Encre, de l'Acide, de la Souffrance
Parallèlement au travail de la peinture, de l'aquarelle, des encres et surtout de la gravure, Eugène Viala, qui admirait l'œuvre de Baudelaire, était également poète. De 1908 à 1909, il dirige une revue régionaliste, le Cri de la Terre, défendant l'agriculture et luttant contre l'industrialisation. On décrit comme misanthrope, tourmenté, libre-penseur et anarchiste cet artiste qui se définissait comme un grand amoureux de la nature. Et c'est celle du Rouergue, austère, parfois morne, qui inspira une grande partie de ses eaux-fortes, ces gravures à l'acide sur métal qui sont sa marque de fabrique : landes, étangs, arbres tourmentées, rochers ou clochers perdus dans la brume.
Mais son œuvre compte également de nombreuses planches fantastiques, allégoriques ou mythologiques, presque hallucinées, qui, selon la présentaton du catalogue, “De l'Encre, de l'Acide, de la Souffrance”, titre de l'un de ces album, donne une idée de l'univers de Viala.
Par ses côtés sombres et les techniques qu'il utilise, on ne peut s'empêcher de faire le rapprochement avec un autre peintre rouergat spécialiste du noir...
La ville de Rodez possède une centaine d'œuvres de Viala, et ce catalogue riche en reproductions est l'occasion de (re)découvrir son travail, tout en profitant de la somme d'informations que Jean Costecalde a collectées au fil des années. Un peu volumineux pour une bibliothèque, mais indispensable à tout amateur de gravures et de Viala.
Espalion, eau-forte / coll. particulière / Pierre Soissons.
Ci-contre, Mélancolie d’hiver, eau-forte et pointe sèche / coll. particulière / Pierre Soissons.
Ci-dessous, “Orphée, l’art éclaire tout”, eau-forte (détail).
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